Filiae regis Francorum

Les princesses des fleurs de lys et la mémoire de la famille royale (fin XIIIe-fin XIVe siècles)

Anne-Hélène Allirot, normalienne, docteur en histoire médiévale22 février 2018. Filiae regis Francorum : les princesses des fleurs de lys et la mémoire de la famille royale (fin XIIIe-fin XIVe siècles). Thèse en histoire (2007) sous la direction de Colette Beaune, Université de Paris X-Nanterre.

Pour sa thèse d'Histoire, Anne-Hélène Allirot s'est penchée sur le destin des femmes de sang royal à la fin du Moyen Âge ! Un destin moins souriant qu'on ne l'imagine...

Votre thèse s'est intéressée aux «princesses des fleurs de lys». Pouvez-vous nous dire qui se cachait derrière ce nom si poétique ?

Il s'agit des femmes de sang royal en France, aux XIIIe et XIVe siècles.

Les rassembler sous l'appellation de «princesses des fleurs de lys» est certes une invitation au rêve, mais malheureusement la réalité fut bien plus morne : c'est en effet à cette époque que l'on cherche à normaliser leur statut de façon radicale puisqu'on les exclut du pouvoir !

Certes, elles peuvent toujours assurer une régence, mais hériter de terres devient impossible, même pour les plus nobles.

Les quatre filles de saint Louis n'eurent droit ainsi qu'à 10.000 livres de dot quand leurs frères bénéficièrent de domaines entiers. Quelle injustice !

Elles sont certes exclues du pouvoir mais ne perdent pas pour autant tout pouvoir !

Pas question de s'enfermer entre leurs quatre murs ! Filles de roi elles étaient, filles de roi elles restaient, et comptaient bien le montrer. Lors de ces grandes cérémonies, elles font rayonner leur sang royal.

Elles se rendent indispensables comme représentantes du lignage de France et garantes des traditions et de la mémoire de la famille.

C'est ainsi que les proches de Louis IX travaillèrent à élaborer le culte du grand homme : dons de reliquaires, fondations d'abbayes, actes de contritions multiples, rien n'était trop beau pour rappeler le souvenir du roi saint.

Celui-ci leur avait d'ailleurs ouvert la voie en rédigeant à leur intention des Enseignements pour qu'elles n'oublient pas que leurs vertus devaient être exemplaires. La plupart s'y plièrent, comme sa sœur Isabelle surnommée «la vierge savante», qui fut béatifiée en 1521.

L'époque aurait donc vu naître une élite féminine irréprochable...

Jeanne de Bourgogne, miniature, in Vincent de Beauvais, Miroir historial, XIVe s., Paris, BnF Il est vrai que les exemples de piété furent nombreux chez ces femmes, mais ne nous y fions pas : toutes ne furent pas des parangons de vertu !

La postérité a gardé de Jeanne de Bourgogne, petite-fille du saint, l'image d'une «male royne boiteuse».

Voici un surnom qui résume bien le personnage, reine de France couverte d'injures de son vivant : on l'accuse d'être cruelle, avide de pouvoir et de richesses et même maudite.

Le décès de ses trois héritiers n'en est-il pas la preuve ?

Pourquoi s'est-elle entêtée à fêter somptueusement son accouchement alors qu'une tempête menaçait ?

Trop d'orgueil tue ! La souveraine n'aurait pas dû donner l'impression de vouloir prendre la place de son époux : la fleur de lys était trop ambitieuse !

Normalienne, docteur en histoire médiévale, Anne-Hélène Allirot est actuellement professeur agrégée d'histoire-géographie en lycée. Ses recherches ont été publiées en 2010 aux éditions Brépols.

Propos recueillis par Isabelle Grégor
Publié ou mis à jour le : 2020-03-11 11:46:52

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